Le gouvernement cambodgien s’apprête à fermer un centre de réfugiés de nationalité vietnamienne. Placé sous la responsabilité du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, le centre se trouve dans le district de Sen Sok. Il abrite sans doute plus de 80 pensionnaires (le chiffre exact n’est pas connu) appartenant à diverses ethnies minoritaires des Hauts Plateaux du centre du Vietnam. Ceux-ci ont quitté leur pays à diverses époques...

... pour fuir les pressions et tracasseries policières après les soulèvements de 2001 et 2004. Beaucoup d’entre eux sont chrétiens, le plus souvent de confession protestante.

La presse cambodgienne du 14 décembre dernier (1) fait état d’une lettre du ministère cambodgien des Affaires étrangères adressée, le 29 novembre dernier, au Haut Commissariat aux réfugiés. Elle l’informe de la décision de fermer les portes du centre pour le 1er janvier 2011. Elle demande à l’organe des Nations Unies de hâter le processus d’installation dans un pays tiers des 62 réfugiés du camp déjà enregistrés comme réfugiés. La lettre ajoute qu’avant la fermeture du centre, le gouvernement souhaite rapatrier au Vietnam les demandeurs d’asile attendant encore l’examen de leur cas, ainsi que les éventuels nouveaux arrivants. Dans la journée du 14 décembre, deux communiqués, émanant respectivement des ministères des Affaires étrangères et de l’Intérieur, ont confirmé les indications données par la lettre et ont informé que la mesure de rapatriement toucherait plus d’une dizaine de demandeurs d’asile actuellement dans le centre.

Pour sa part, le Haut Commissariat a demandé au gouvernement de lui donner davantage de temps pour régler les problèmes posés par la fermeture du centre, en particulier l’installation en pays tiers des Montagnards déjà enregistrés comme réfugiés. Selon les déclarations du Haut Commissariat, les pensionnaires actuellement au centre sont les derniers de la vague de demandeurs d’asile venus des Hauts Plateaux du centre Vietnam pour se mettre sous la protection des Nations Unies au Cambodge. Depuis 2006, ils ont été 1 812 à venir demander l’asile. Grâce au Haut Commissariat, 999 d’entre eux sont allés s’installer dans un pays tiers, pour la plupart aux Etats-Unis, tandis que 751 ont été rapatriés au Vietnam.

Mais, en réalité, les chiffres sont beaucoup plus importants si l’on tient compte du fait que cette vague de réfugiés venant des Hauts Plateaux a débuté en 2001. Cette année-là, la répression et les procès qui suivirent le premier soulèvement montagnard entraînèrent un premier exode des militants les plus engagés vers le Cambodge. Un millier de ces premiers demandeurs d’asile avaient été ensuite admis dans un pays d’asile définitif, la plupart aux Etats-Unis. Trois ans plus tard, après le soulèvement du week-end pascal de 2004 et la violente répression qui suivit, le mouvement d’exode avait repris, moins massif mais durable, un mouvement aussi mal considéré par les autorités vietnamiennes que cambodgiennes. Les chiffres précis de la totalité des Montagnards des Hauts Plateaux ayant franchi la frontière depuis avril 2004 ne sont pas connus. En janvier 2005, des accords tripartites ont été signés entre le Haut Commissariat, le Vietnam et le Cambodge (2), prévoyant la possibilité pour les Montagnards de revenir volontairement dans leur pays. En 2OO6, 700 Montagnards du second exode avaient déjà choisi de s’établir dans un tiers pays, généralement aux Etats-Unis. Depuis les accords, des rapatriements ont eu lieu à de nombreuses reprises, touchant des Montagnards n’ayant pas obtenu du Haut Commissariat le statut de réfugié. D’autres arrêtés par la police cambodgienne avant de rencontrer les fonctionnaires du HCR ont été directement livrés à la police vietnamienne.

Par ailleurs, les accords tripartites de janvier 2005 donnent au Haut Commissariat aux réfugiés un droit de regard sur les conditions d’existence des Montagnards ayant choisi le retour dans leur pays. Des délégués du HCR sont venus rendre visite aux anciens réfugiés revenus au Vietnam. Certains des rapports publiés à l’issue de ces voyages ont été violemment critiqués par des associations humanitaires concernées par le problème, en particulier le groupe américain Human Rights Wacht.

(1) Voir The Phnom Penh Post du 14 décembre 2010, « Vietnamese refugees face deportation ». Voir également la dépêche d’Associated Press du 14 décembre 2010.

(2) Voir EDA 346,347, 349

(Source: Eglises d'Asie, 15 décembre 2010)