Liberté sous surveillance

Vietnam: La liberté n’est pas aussi libre que l’on croit. Fragile.

La liberté de voyager et de rencontrer par exemple, toutes les agences de voyage en parlent. Eh bien, non. Je rentre, avec 25 partenaires, d’un voyage au Vietnam. Tout était prévu depuis plus de six mois: avion, hôtels, accompagnateur, rencontres avec des paroisses catholiques, un évêque, un monastère né de notre voisin « La Pierre qui Vire ». Jusqu’au vendredi soir avant le départ. « Vous avez un visa touristique: interdiction vous est faite de rencontrer quelque communauté chrétienne que ce soit, d’entrer à titre personnel ou en groupe dans quelque église ou chapelle que ce soit sous peine de reconduction à a frontière et autres sanctions. » On ne plaisante pas, en régime communiste, fut-il capitaliste, avec ce genre de « conseil ».Nous étions partis pour rencontrer des amis. Nous avons vu des paysages et des monuments. Mais quand on a vu le mausolée sans visiteurs de Lénine à Moscou, sa copie pour d’Oncle HO (Chi Minh), tout aussi déserté, à Saïgon est dénué d’intérêt.

L’interdiction faite à des touristes de rencontrer une partie de la population locale, par contre, dit sous quel régime vit le peuple. Une dictature communiste à visage capitaliste. Ce qui cumule les inconvénients des deux régimes: étouffement de la liberté de penser, délation, calomnies infâmes des non alignés par les tenants du régime, intimidations sous toutes les formes, des plus sournoises aux plus violentes.

Les chrétiens, les catholiques – mais qui en parle ? –sont depuis des années victimes de violences mortelles: en Irak les assassinats ne se comptent plus. En Inde, rien qu’en Octobre, 500 chrétiens ont été assassinés dans l’Etat d’Orissa… mais le Parti communiste indien qui a fait « son » enquête dit: 30 seulement… On croirait lire les communiqués organisateurs/forces de police au lendemain d’une manif en France. A Kenya, deux religieuses ont été enlevées voici quelques jours… La liste est loin d’être close.

N’en déplaise à deux et celles qui pensent que la liberté de conscience n‘a droit d’exister que dans les sacristies, j’ai constaté, une fois de plus, au Vietnam que quand la liberté religieuse est écrasée, interdite, massacrée, la liberté tout court n’est pas loin de mourir si elle n’est pas déjà morte.

Il n’est pas question bien sûr de revendiquer une dictature des religions sur les choix des sociétés.

Mais je rentre de Hanoï avec une certitude: quand les chrétiens, catholiques ou autres, osent vivre et dire la foi, ils sont gênants. Ce qui est un signe de santé. Pour l’Eglise qui est libre. Pour la société qui risque, sans cela, de perdre sa liberté.

(Source: Msgr. Pierre Calimé, LA GAZETTE, 24 Novembre 2008 )