VIETNAM: Son La: après des années d’interdiction, la communauté catholique peut enfin célébrer la messe dominicale

Au cours de ces dernières années, les autorités civiles de Son La, ville de la région montagneuse du Nord-Ouest du Vietnam, se sont rendues tristement célèbres par les entraves qu’elles ont apportées à la liberté de religion et à l’exercice du culte dans cette ville. Elles semblent aujourd’hui vouloir procéder à un changement de cap dans leur comportement à l’égard de la communauté catholique locale, forte de quelque 500 fidèles, venus pour la plupart de la basse région pour gagner leur vie en ville. Ce revirement s’est manifesté avec une certaine ostentation, le samedi 24 octobre dernier. Ce jour-là, le P. Joseph Nguyên Trung Thoai, prêtre chargé de la communauté par l’évêché de Hung Hoa, est venu officiellement présider l’assemblée eucharistique dans la salle mise à la disposition de la communauté par un catholique de la ville, M. Trinh Xuân Thuy.

Les chrétiens de Son La, privés depuis longtemps de leurs droits élémentaires dans le domaine religieux, étaient venus nombreux. La célébration a débuté par une procession traditionnelle en l’honneur de la Vierge Marie et s’est poursuivie par la messe dominicale anticipée. Une délégation importante de la Sécurité, composée de représentants de la province, de la ville et du quartier, s’était invitée aux cérémonies. Les membres de la délégation avaient déclaré auparavant qu’ils avaient l’intention de photographier et de filmer l’événement afin d'en rendre compte aux autorités supérieures. Les policiers étaient également nombreux à l’extérieur où ils avaient pour mission de surveiller les lieux et de prévenir tout désordre (1).

Malgré son caractère quelque peu ostentatoire et indiscret, la présence non agressive de la Sécurité a constitué pour les catholiques une heureuse surprise. Jusque-là, la plupart des rassemblements de la communauté, en particulier les jours de grande fête, avaient donné lieu à des affrontements avec les forces de l’ordre ou avec les hommes de main de celle-ci (2). Lors de la nuit de Noël 2008, les autorités municipales avaient tout simplement décrété le couvre-feu sur le quartier où se réunissait la communauté chrétienne. Pour la fête de Pâques qui avait suivi, les mêmes responsables avaient mobilisé une troupe hétéroclite composée de cadres du gouvernement, de policiers et de désœuvrés recrutés pour la circonstance, afin d’empêcher le prêtre de célébrer l'eucharistie. Depuis l’année 2000, l'évêque du diocèse avait en vain essayer de faire reconnaître cette communauté par les autorités civiles. La réponse reçue était jusqu’ici invariablement la même: « Il n'y a point de besoins religieux à Son La ». Ces entraves à la liberté religieuse avaient même fini par alerter l’attention de la délégation de la Commission américaine pour la liberté religieuse dans le monde, en visite au Vietnam au mois de mai dernier (3). La délégation était venue sur place le 19 mai, dans la salle où se réunissent les catholiques. Malgré la présence des autorités civiles, les chrétiens de Son La avaient exposé sans fard la situation de leur communauté religieuse.

Les fidèles de Son La espèrent que cette première célébration autorisée sera le début d’une longue série de messes hebdomadaires et d’une existence normale de leur communauté dont les besoins seront enfin reconnus. Pour le moment, ils attribuent ce premier changement à la lutte persévérante qu’ils mènent depuis plusieurs années auprès des autorités aussi bien locales que centrales, et surtout à la solidarité qui leur a été manifestée par les catholiques du pays et de la diaspora ainsi que par un grand nombre d’associations humanitaires internationales. Il est probable que le rapport (encore non publié) de la Commission américaine pour la liberté religieuse dans le monde, aura joué un rôle important dans le déblocage de la situation.

(1) Informations extraites d’un article de J.B.Nguyen Huu Vinh, Vietcatholic, 24 octobre 2009.
(2) Voir EDA 499, 506, 476.
(3) voir le compte rendu de la rencontre dans EDA 508

(Source: Eglises d'Asie, 26 octobre 2009)