La grève de la faim est en train de devenir l’arme favorite des prisonniers de conscience vietnamiens dans leur résistance non violente au régime en place. Après les 27 jours de jeûne de Cu Huy Ha Vu, cette arme est à nouveau utilisée dans d’autres camps d’internement. Un jeune militant catholique, Paul Trân Minh Nhât, vient
d’entamer un jeûne intégral destiné à faire connaître sa protestation contre ses conditions de détention au centre d’internement de Nghi Kim (Nghê An) (1). Dans une autre prison, un avocat catholique, Lê Quôc Quân, a lui aussi décidé de ne plus s’alimenter pendant toute une semaine. Ses intentions sont toutefois différentes puisqu’il veut ainsi se préparer dans la prière et le recueillement à son procès, qui doit avoir lieu le 9 juillet.

Paul Trân Minh Nhât, originaire d’une paroisse catholique du diocèse de Vinh, a été arrêté le 27 août 2011. Il était le quinzième d’une série de militants catholiques et protestants appréhendés à cette époque. Encore étudiant à la faculté des langues étrangères et d’informatique de Hanoi, il achevait, le jour de son arrestation, son examen de fin d’études. La police était venue le chercher sur le terrain de l’université elle-même. Paul Minh Nhât et les autres catholiques arrêtés étaient accusés d’activités visant à renverser le pouvoir populaire. Ils furent jugés, et pour la plupart, condamnés à de lourdes peines de prison le 9 janvier 2013, par le Tribunal populaire de la province du Nghê An. Le jeune étudiant s’était vu infliger quatre ans de prison assortis de trois années de résidence surveillée. Cette sentence avait été confirmée en appel le 23 mai dernier. Lors des deux procès, il avait affirmé son innocence et déclaré n’avoir participé qu’à des activités religieuses ou sociales. Dans sa prison, il a continue sa lutte pour la défense de ses droits fondamentaux, ce qui lui a valu un traitement particulièrement rigoureux. C’est pour protester contre cet état de choses qu’il a entamé un jeûne le 21 juin 2013. Selon le témoignage de ses proches, qui sont venus lui rendre visite avant la grève, il nourrissait ce dessein depuis quelque temps déjà.

Ce sont de tout autres raisons qui ont poussé un autre prisonnier politique, l’avocat catholique Lê Quôc Quân à se priver de nourriture pendant plusieurs jours. A la veille de son procès, il a confié à des proches que, du 23 au 30 juin, il entrerait dans une période de recueillement et de prière, en jeûnant. Il aurait ensuite quelques jours pour reprendre des forces avant son procès. Selon ceux qui ont reçu ses confidences, il veut manifester ainsi sa reconnaissance pour tous ceux qui se sont préoccupés de lui, ont prié pour lui dans le passé et continuent à le faire. L’avocat a tenu à préciser qu’il ne s’agissait en aucune façon d’une grève de la faim de protestation comme celle qu’il avait menée auparavant pour obtenir de pouvoir lire la Bible. Cela ne signifie pas pour autant que le prisonnier soit content du traitement particulièrement sévère qu’il subit, ni de ses conditions de détention qui, selon sa famille, sont déplorables.

Lê Quôc Quân est un avocat catholique de 42 ans, membre de la Commission ‘Justice et Paix’ du diocèse de Vinh, connu depuis une dizaine d’années pour son engagement au service des pauvres et sa lutte pour la cause de la liberté religieuse et de la démocratie. En 2007, alors qu’il était conseiller de la Banque mondiale et du Fond des Nations Unies pour le développement, il fut arrêté pour avoir participé à une session organisée par une association américaine en Thaïlande. Il reçut alors le soutien de très hauts dirigeants des Etats-Unis. En 2009, il avait participé à la lutte des catholiques de la capitale pour la restitution de l’ancienne résidence de la délégation apostolique, confisquée par l’Etat. En 2011, lors du procès de Cu Huy Ha Vu, il avait été de nouveau arrêté, avant d’être libéré au bout de quelques jours sous la pression de l’opinion publique. Depuis le milieu de l’année 2012, les autorités ont multiplié les menaces et les pressions violentes à son encontre. Il a finalement été arrêté le 28 décembre 2012 et inculpé pour non-paiement d’impôts.



(1) Voir à ce sujet VRNs (dépêche du 22 juin 2013) et Radio Free Asia (émission en langue vietnamienne du 24 juin 2013)

(Source: Eglises d'Asie, 27 juin 2013)