Dans une émission du 13 septembre 2015, le service en langue vietnamienne de la BBC rapporte les déclarations d’un porte-parole du ministère de l’Intérieur cambodgien. Des centaines de Montagnards venus des Hauts Plateaux du Centre-Vietnam ont franchi la frontière vietnamo-cambodgienne et demandent le statut de réfugié. Seuls treize d’entre eux ont obtenu des autorités cambodgiennes le statut de demandeur d’asile. L’agent du ministère a ajouté que tous les autres seront considérés comme résidant illégalement dans le pays et devront être expulsés vers leur pays d’origine, le Vietnam.

Cet extrême sévérité manifestée à l’égard des populations minoritaires des Hauts Plateaux du Centre-Vietnam ayant fui leur pays pour des raisons religieuses et politiques, et séjournant depuis des mois dans les forêts frontalières du pays, n’est pas circonstancielle. Depuis le début de l’année 2015, au total, seules les 13 personnes mentionnées par le porte-parole ont été reconnues comme demandeurs d’asile, alors que plus de 200 Montagnards ont déposé leur demande. Le porte-parole des affaires intérieures du Cambodge a aussi précisé que les Montagnards acceptés comme demandeurs d’asile avaient été conduits dans les bureaux du Haut Commissariat des Nations Unies aux réfugiés. Celui-ci étudiera leur cas et leur proposera une installation définitive dans un pays tiers

L’exode des réfugiés des Hauts Plateaux du Vietnam, qui avait commencé après le soulèvement de certains groupes en 2001 et réapparu après la résurgence du mouvement en 2006, n’a en réalité jamais cessé depuis cette époque. Cette migration avait cependant baissé d’intensité ces dernières années.

En octobre 2014, une nouvelle vague de réfugiés montagnards a quitté les Hauts Plateaux, franchi la frontière pour venir se réfugier dans la forêt de la province cambodgienne de Ratanakiri. La motivation de cet exil est toujours la même, à savoir l’absence de liberté religieuse et politique. Après le refus du ministère de l’Intérieur de leur accorder le statut de réfugié, déjà, cinquante de ces Montagnards avaient été ramenés au Vietnam, manu militari.

Un certain nombre d’organisations de défense des droits de l'homme ont élevé la voix et ont émis de sévères critiques contre la politique d’expulsion pratiquée par le gouvernement cambodgien. Elles soulignent que, revenus dans leur région, les demandeurs d’asile font l’objet de sanctions et de répression. Phil Robertson, chargé de l’Asie au sein de Human Rights Watch, a qualifié la décision du gouvernement cambodgien de « scandaleuse ». Il a accusé les dirigeants cambodgiens de se soustraire aux obligations découlant de leurs engagements internationaux.

En 2001, après le soulèvement de certains groupes montagnards des Hauts Plateaux du Vietnam, les autorités vietnamiennes avaient lancé une campagne de répression concernant à la fois l’exercice de la liberté religieuse et la volonté d’indépendance de certains leaders. Cette campagne est à l’origine du départ vers la frontière cambodgienne des premiers Montagnards, fuyant les arrestations et les procès. Ce premier exode fut pris en charge par le Haut Commissariat des Nations Unies aux réfugiés et se solda par quelque 3 000 départs vers des pays tiers, en particulier les Etats-Unis. L’exode reprit de plus belle après le deuxième soulèvement du week-end pascal 2004. En janvier 206, des accords tripartites furent signés qui donnaient la possibilité aux Montagnards réfugiés de s’installer dans un pays tiers ou de revenir dans leur pays sous le contrôle du Haut Commissariat. Environ 700 Montagnards du second exode avaient choisi de s’établir dans un tiers pays, généralement aux Etats-Unis. Ces derniers temps, la situation s’est nettement détériorée avec le refus de plus en plus prononcé des autorités khmères d’accepter la présence de Montagnards du Vietnam sur leur territoire. (eda/jm)

(Source: Eglises d'Asie, le 15 septembre 2015)