Eglises d'Asie, 3 novembre 2011 - Le 25 mars 2012 sera désigné le successeur de Donald Tsang qui est à la tête de la Région administrative spéciale de Hongkong depuis 2005. Selon la Loi fondamentale, le texte constitutionnel particulier qui régit les institutions de l’ancienne colonie britannique (1), le responsable de l’exécutif a la haute main sur l’ensemble du gouvernement de Hongkong hormis les Affaires étrangères et la Défense, qui dépendent exclusivement de Pékin. ...

... Selon le système électoral actuellement en vigueur, c’est un comité électif de 1 200 personnes qui sera chargé de désigner le prochain chef de l’exécutif, lequel sera ensuite officiellement nommé par le gouvernement chinois.

Le 30 octobre dernier, le Conseil chrétien de Hongkong, habilité à participer à la procédure de sélection des 1 200 délégués, a ainsi désigné dix délégués qui siègeront au sein de ce comité. Parmi les 42 candidats chrétiens qui se sont présentés, les dix vainqueurs appartiennent aux Eglises méthodiste, baptiste, anglicane, évangéliques et à d’autres confessions protestantes. La moitié d’entre eux sont issus du clergé et l’autre moitié du monde laïc. Hongkong compte environ 10 % de chrétiens, dont une moitié sont des catholiques.

Leur participation à un système électoral dénoncé comme antidémocratique a toutefois été fustigée par des nombreux groupes chrétiens qui ont souligné que le comité électoral était composé d’une majorité écrasante de groupes pro-Pékin et de responsables d’entreprises impliquées dans des relations commerciales et financières avec la Chine continentale. Le 28 octobre, ces groupes chrétiens avaient mis en garde le Comité chrétien dans un long plaidoyer publié dans un journal non confessionnel, leur demandant de boycotter le vote en démissionnant ou en votant à bulletin blanc.

« L’ensemble de ce système électoral est inique et antidémocratique. Le conseil chrétien ne devrait pas y participer, mais au contraire boycotter les prochaines élections », a réagi au lendemain du vote, le 31 octobre, auprès de l’agence ENI News, Andrew Shum Wa-nam, chargé du secteur social de l’Institut chrétien de Hongkong.

Répondant à ces critiques, le Conseil chrétien de Hongkong a déclaré que sa participation au comité chargé d’élire le chef du gouvernement permettra aux chrétiens de faire entendre leur voix, y compris dans le domaine du développement social. « Il est vrai que le processus de désignation du chef de l’exécutif à Hongkong n’est pas idéal », a reconnu le Rév. Po Kam-cheong, secrétaire général du Conseil chrétien, ajoutant cependant que bien que son groupe se positionne clairement en faveur l’instauration du suffrage universel, il n’a en revanche jamais considéré que le boycott des élections était une solution. « Le fait que des membres des Eglises chrétiennes participent au processus électoral peut offrir une possibilité aux chrétiens de faire entendre leur voix et d’exprimer leurs attentes au sujet du futur gouvernement et du développement social de Hongkong », a-t-il argumenté.

Hongkong, qui bénéficie, selon la formule « Un pays, deux systèmes », d’une autonomie relative vis-à-vis de Pékin, est officiellement en phase de transition institutionnelle visant à mettre en place un système démocratique sur son territoire d’ici 2047, soit cinquante ans après sa rétrocession à la Chine en 1997. Mais après plusieurs tentatives avortées pour faire adopter le suffrage universel, prévu cependant par la Loi fondamentale (2), les partisans pro-démocrates ont subi une défaite cuisante en juin 2010 lorsqu’un ensemble de réformes portant sur le système électoral a été voté sous la pression de Pékin. La désignation en mars 2012 du chef de l’exécutif se fera selon cette nouvelle réforme qui, sous le couvert d’élargir le processus démocratique, a en réalité renforcé le système existant (3).

Alors qu’il y a peu encore, Pékin laisser espérer aux Hongkongais une élection du chef de l’exécutif au suffrage universel d’ici 2017, la perspective d’accéder à un système politique démocratique avant l’expiration du délai de fonctionnement de la Loi fondamentale, semble s’effacer devant le verrouillage progressif des institutions par la Chine. Le résultat attendu de l’élection de mars 2012 étant la victoire d’un candidat pro-Pékin, certains leaders du mouvement pro-démocrate, tel Alan Leong du Parti civique, ont d’ores et déjà annoncé vouloir boycotter les élections.

(1) Hongkong, qui a le statut de Région administrative spéciale au sein de la République populaire de Chine, fonctionne sous le régime de la Loi fondamentale (Basic Law) qui lui sert de Constitution et lui garantit pendant cinquante ans l’application du système juridique et politique antérieur à la rétrocession à la Chine en 1997.
(2) L’article 45 de la Loi fondamentale de Hongkong stipule que « le but ultime est de choisir le chef de l’exécutif par le suffrage universel sur nomination par un comité de nomination largement représentatif et selon les procédures démocratiques ».
(3) Par ces réformes votées en juin 2010, le collège chargé d’élire le chef de l’exécutif a été élargi de 800 à 1 200 membres. Au Legco (Legislative Council), le Parlement de Hongkong, le nombre des députés, dont 30 étaient élus au suffrage universel et 30 par des collèges électoraux fondés sur l’appartenance à une profession (où les pro-Pékin dominent), est passé à 70, les dix nouveaux sièges étant pourvus pour moitié au suffrage universel réel et pour moitié à un suffrage pseudo-universel car limité à des candidats présélectionnés par les collèges professionnels. A l’époque, le cardinal Zen Ze-kiun avait dit de ces réformes qu’elles « ne feraient que maintenir, voire renforcer le système des électorats restreints, alors que l’objectif ultime était de le supprimer ». Voir EDA 532

(Source: Eglises d'Asie, 3 novembre 2011)