Lundi 15 novembre, un millier de fidèles ont pris place dans la grande église de la ville de Zibo (province du Shandong) pour assister à l’ordination de Mgr Joseph Yang Yongqiang, consacré évêque coadjuteur de Zhoucun avec l’accord des autorités chinoises et celui de Rome. Cette ordination porte à dix le nombre des nouveaux évêques « officiels » reconnus par Rome et ordonnés depuis le début de cette année.
En l’absence de l’évêque en titre du diocèse de Zhoucun, Mgr Ma Xuesheng, alité depuis plusieurs mois, c’est Mgr Johan Fang Xingyao, du diocèse de Linyi (Shandong), qui a présidé la cérémonie. Il était assisté de Mgr Joseph Li Mingshu, de Qingdao (Shandong), de Mgr Zhao Fengchang, de Liaocheng (1), de Mgr Zhang Xianwang, de Jinan (Shandong), et de Mgr Joseph Xing Wenzhi, évêque auxiliaire de Shanghai et natif de Zhoucun. Tous sont des évêques « officiels » reconnus par le pape.

Le nouvel évêque est issu d’une famille catholique du district de Boxing, région qui a donné nombre de vocations sacerdotales et religieuses à l’Eglise locale. Agé de tout juste 40 ans, il a connu un parcours aujourd’hui classique: formé au séminaire régional de Sheshan, près de Shanghai, il a été ordonné à l’âge de 25 ans pour ensuite revenir exercer son ministère de prêtre dans son diocèse d’origine, Zhoucun. Rapidement, il a été nommé curé, avant d’être appelé en 2005 à Jinan, chef-lieu de la province du Shandong, où il a enseigné au grand séminaire du Saint-Esprit. Parallèlement, il a exercé diverses responsabilités au sein de l’Association patriotique de la province et auprès du Comité pour les affaires de l’Eglise, branche locale de l’Administration d’Etat pour les Affaires religieuses. Fin 2009, il a été choisi à l’unanimité par ses frères prêtres pour devenir évêque coadjuteur de Zhoucun.

Avec quelque 18 000 fidèles, le diocèse de Zhoucun présente la particularité de ne compter que 13 prêtres et trois religieuses. Face à cette réalité, le nouvel évêque a exprimé le souhait de travailler à la promotion des vocations ainsi qu’au développement de l’engagement des laïcs, notamment dans l’aide sociale et les cercles d’études de la Bible. Concernant les rapports avec les communautés catholiques « clandestines » – qui sont sans évêque depuis le décès, en janvier 2005, de Mgr Gao Kexian, évêque des diocèses de Zhoucun et de Yantai –, Mgr Yang Yongqiang a déclaré que le dialogue pouvait être approfondi; il a noté à cet égard que des communautés « officielles » partageaient des lieux de culte avec des communautés « clandestines ».

A l’agence Ucanews (2), le P. Wu Kexing, prêtre du diocèse de Zhoucun, a exprimé l’espoir que la consécration d’un nouvel évêque contribue à donner un nouveau souffle à l’évangélisation dans la région. « Nous, les jeunes prêtres, nous nous démenons pour développer l’Eglise mais je pense que le nouvel évêque, qui est jeune, apportera un surcroît de vitalité », a-t-il expliqué.

Le même jour où, dans le Shandong, l’évêque coadjuteur de Zhoucun était ordonné, l’évêque de Shijiazhuang, dans le Hebei, décédait. Le 15 novembre, à l’âge de 84 ans, Mgr Paul Jiang Taoran est mort à l’hôpital d’un arrêt du cœur.

Ordonné sans mandat pontifical en 1989, Mgr Jiang Taoran était entré dans la communion apostolique en 2008 lorsque le pape Benoît XVI l’avait reconnu comme « un évêque légitime sans juridiction ». Ce statut tenait au fait qu’à la tête du diocèse de Zhengding (qui est le nom sous lequel Rome connaît le diocèse de Shijiazhuang), se trouve Mgr Julius Jia Zhiguo, évêque « clandestin » qui est régulièrement arrêté par la police et fait l’objet d’une étroite surveillance des autorités. Selon des témoignages sur place, Mgr Jiang Taoran « avait pleinement accepté cette situation, se plaçant sans ambiguïté sous l’autorité de Mgr Jia et devenant ainsi un exemple pour les prêtres ». Depuis, dans ce diocèse de Zhengding - Shijiazhuang, certaines paroisses sont co-administrées par des prêtres « clandestins » et « officiels ». Les deux communautés confondues, le diocèse de Zhengding compte 150 000 fidèles.

Quelles que soient les difficultés par lesquelles est passé Mgr Jiang Taoran (3), se pose aujourd’hui la question de ses funérailles. La date et le lieu ont été fixées: elles auront lieu le 19 novembre en sa cathédrale de l’Immaculée Conception (beitang, ‘l’église du nord’), à Shijiazhuang. De manière à exprimer l’unité de l’Eglise et la communion du diocèse, des prêtres souhaitent que la messe soit présidée par Mgr Julius Jia Zhiguo, mais rien n’indique, à cette heure, que les autorités autoriseront le prélat, âgé de 75 ans, à assumer cette responsabilité.

(1) Diocèse issu de la fusion, le 22 décembre 1999, des diocèses de Yanggu et de Linqing, dans le Shandong
(1) Ucanews, 15 novembre 2010.
(2) Né dans un district proche de Baoding, bastion catholique du Hebei, Mgr Jiang Taoran a étudié la philosophie et la théologie à Pékin dans les années troublées de la guerre civile et de la prise du pouvoir par les communistes. Ordonné prêtre en 1953, il a exercé son ministère jusqu’en 1957, année où le régime a mis fin aux activités de l’Eglise. Employé au sein d’un hôpital durant plusieurs années, il est condamné lors de la Révolution culturelle (1966-1976) à « la réforme par le travail ». Ce n’est qu’en 1982 que, sorti des camps, il peut regagner Shijiazhuang et reprendre son ministère de prêtre. En 1989, il est choisi pour devenir évêque du diocèse. Figure controversée pour avoir accepté l’épiscopat sans mandat pontifical ainsi que pour la manière dont les biens immobiliers du diocèse ont été gérés sous sa responsabilité, Mgr Jiang Taoran aura été pris en tenailles entre les principes de l’Eglise et les pressions des autorités, plaide en sa faveur des prêtres qui l’ont bien connu.

(Source: Eglises d'Asie, 15 novembre 2010)