PHILIPPINES: A quelques jours des élections, les évêques appellent au bon déroulement des opérations de vote

Eglises d’Asie, 7 mai 2010 – « Tous, sans exception, nous devons soutenir le travail de la COMELEC afin que les élections (du 10 mai 2010) se déroulent dans l’ordre, de manière pacifique et honnête. » Tels sont les mots choisis par le cardinal Gaudencio Rosales, archevêque de Manille, lors d’une prière œcuménique prononcée le 5 mai au siège de la Commission électorale (COMELEC) à Manille.

A trois jours du scrutin, qui doit voir le renouvellement de près de 18 000 postes électifs – dont le président et le vice-président de la République ainsi que les sénateurs –, les bruits les plus contradictoires courent à propos du déroulement des opérations électorales. Pour la première fois, le vote se déroulera à l’aide de machines à voter électroniques (1) et les Philippins s’interrogent sur la capacité de leur pays à mener à bien une telle procédure électorale. Des défauts ont été constatés sur les cartes mémoires de certaines machines et 70 000 nouvelles cartes électroniques ont dû être importées d’urgence de Hongkong et de Taiwan pour être réinstallées. Dans le pays, certains appellent au report des élections. D’autres disent que les informations quant à un échec complet de la procédure sont colportées par les partisans de la présidente actuellement au pouvoir, Gloria Arroyo, qui, ne pouvant se représenter devant les électeurs, profiterait d’une situation de chaos pour se maintenir au pouvoir au-delà du 10 mai.

Dans ce contexte de surchauffe pré-électorale, le cardinal de Manille a affirmé que l’heure n’était pas à la division. Il a donné sa bénédiction à Jose Melo, le commissaire placé à la tête de la COMELEC (Commission on Elections), et à son équipe, affairée à régler la mise en place des nouvelles cartes électroniques. « Tous, et notamment les hommes d’Eglise, doivent avoir à l’esprit qu’il est essentiel que les citoyens puissent exercer leur droit de vote et choisir ainsi ceux qui seront amenés à les diriger », a ajouté le cardinal.

Parallèlement, pour minimiser les risques de fraude lors du scrutin, des réseaux citoyens, parmi lesquels se trouvent des catholiques, se sont organisés afin de surveiller le bon déroulement des opérations électorales. Ainsi le Parish Pastoral Council for Responsible Voting, animé par des curés de paroisse et des laïcs, a fait cause commune avec l’Association des diffuseurs radio des Philippines pour comptabiliser de manière indépendante les résultats des élections du 10 mai dans un maximum de bureaux de vote et centraliser ensuite les résultats. Le groupe annonce qu’il devrait être en mesure de produire des données chiffrées pour l’élection du président, du vice-président et des sénateurs aux alentours du 14 mai. Au Centre catholique Pie XII, situé au cœur de Manille, un bureau de comptage a été installé et devrait procéder au décompte des bulletins de vote à partir des données fournies par la COMELEC.

Enfin, le chef d’état-major des Forces armées des Philippines a demandé à être reçu par le comité permanent de la Conférence épiscopale. Le 4 mai, le général Delfin Bangit a ainsi été entendu par les dix évêques du comité permanent. La rencontre a eu lieu à huis clos. Selon Mgr Arturo Bastes, évêque de Sorsogon, le militaire a déclaré aux évêques que l’armée était « au top de la situation » et resterait dans la légalité, quelle que soit la tournure que prendront les événements le 10 mai et les jours suivants. « Nous avons reçu l’assurance qu’il respectera la Constitution et fera tout ce qui est en son pouvoir pour que les élections se déroulent pacifiquement », a précisé Mgr Bastes.

Ancien chef de la sécurité au palais présidentiel, le général Delfin Bangit ainsi que plusieurs autres officiers supérieurs ont fait l’objet de suspicions, certains estimant que Gloria Arroyo avait placés des proches aux plus hauts postes de l’armée afin d’être certaine du soutien des militaires en cas de troubles. En sortant de sa rencontre avec les évêques catholiques, le général a déclaré que, même s’il était probable que les opérations électorales ne seraient pas exemptes de problèmes, ces derniers ne devraient pas entraîner le chaos. Il a ajouté que, même en cas d’un soulèvement populaire – « le pire scénario qui puisse être » –, l’armée ferait son devoir: « Nous avons une position très claire là-dessus. Nous serons toujours du côté de la Constitution. Nous serons toujours du côté du peuple. On ne peut changer cela. »

Le 7 mai, alors que la campagne électorale s’achève, Benigno Aquino III fait figure de grand favori. Avec 38 % des intentions de vote, il devance de douze points son principal adversaire, le sénateur Manny Villar.

(1) Voir dépêche EDA diffusée le 29 avril 2010.