Eglises d’Asie, 10 mars 2010 – Du 16 au 18 mars 2010, les Philippines accueilleront une réunion de niveau ministériel du Mouvement des non-alignés consacrée au dialogue interreligieux et à la coopération pour la paix et le développement. Le ministère des Affaires étrangères philippin attend une soixantaine de délégations et met en avant « la riche tradition » du pays, notamment en matière de coopération entre évêques catholiques et oulémas musulmans, pour expliquer que l’objet de la rencontre ne sera pas de débattre de théologie mais de réunir des responsables religieux autour de sujets tels que la pauvreté, le développement, la paix ou la sécurité.

S’inscrivant dans la continuité du XVème sommet des Etats membres du Mouvement des non-alignés, qui s’est tenu à Charm el-Cheikh, en Egypte, les 15 et 16 juillet derniers, la rencontre organisée à Manille se veut être un lieu d’échanges où les pratiques en matière de paix, de dialogue et de développement seront partagées pour le bien commun.

Initialement programmée au début du mois de décembre 2009, la rencontre a été repoussée à la demande des Philippines, dont le gouvernement avait alors dû gérer les conséquences du passage de deux typhons particulièrement violents sur son territoire. En dépit de ce report, le ministère des Affaires étrangères philippin estime que la participation sera élevée, 67 des 118 nations membres du Mouvement des non-alignés ayant confirmé l’envoi d’une délégation. Des tables rondes seront organisées pour mêler des responsables religieux, des hommes d’affaires et des dirigeants d’ONG. Parmi les principaux invités appelés à donner des conférences, figurent William Bentley, secrétaire général de la Conférence mondiale sur la paix et la religion, qui introduira les échanges par une réflexion sur les « Problèmes mondiaux affectant la paix et le développement », et le Rév. Christopher Ferguson, représentant aux Nations Unies du Conseil œcuménique des Eglises, dont la contribution portera sur la « Collaboration entre gouvernement et société civile à propos du dialogue interreligieux ».

Pour relancer un mouvement des non-alignés en perte de vitesse, les Philippines compte mettre en avant l’expérience acquise dans le dialogue interreligieux grâce à la Conférence des évêques et des oulémas. Depuis 1996, le Forum des évêques et des oulémas, qui est devenu plus tard la Conférence des évêques et des oulémas, est ce lieu d’échanges et de dialogue mis en place pour tenter d’apporter une solution à l’un des principaux conflits qui minent le pays depuis des décennies, à savoir la difficile cohabitation entre la majorité catholique et la minorité musulmane à Mindanao, dans le sud philippin (1). Aujourd’hui, la Conférence réunit 24 évêques catholiques, 18 pasteurs ou évêques protestants et 26 responsables religieux musulmans. Une rencontre est organisée tous les trois ans et, entre-temps, une structure de dialogue imans-prêtres-pasteurs se réunit régulièrement pour tenter de désamorcer les sources potentielles de conflits et d’incompréhension entre les communautés. Récemment, Manille a confié à la Conférence des évêques et des oulémas la tâche d’organiser une série de consultations, Konsult Mindanaw, dans le cadre des négociations de paix menées avec le Front moro de libération islamique.

Partie prenante de la Conférence des évêques et des oulémas, l’Eglise catholique des Philippines joue le jeu du gouvernement et participe aux initiatives prises pour étendre le modèle de la Conférence à d’autres pays. Ainsi, des échanges réguliers ont lieu avec l’Indonésie et, en janvier dernier, une délégation comprenant des évêques et des oulémas philippins a été accueillie au Pakistan (2). Mgr Fernando Capalla, archevêque catholique de Davao, à Mindanao, faisait partie de la délégation reçue à Islamabad. « Le ministre des Affaires étrangères (pakistanais) et ses adjoints ont été très intéressés par ce que nous leur avons expliqué. Le Pakistan a annoncé que sa délégation pour la rencontre de Manille compterait douze personnes, dont des responsables religieux. Nous les avons invités à venir nous rendre visite sur place, à Mindanao, une fois la rencontre terminée », a précisé Mgr Capalla à l’agence Ucanews (3).

(1) Voir EDA 405 (Dossiers et documents: « Une expérience de dialogue islamo-chrétien aux Philippines: la Conférence des évêques et des oulémas » par le P. Michel de Gigord, MEP)
(2) Voir EDA 522
(3) Ucanews, 10 mars 2010.

(Source: Eglises d'Asie, 10 mars 2010)