A la veille de l’ouverture de l’année jubilaire au Vietnam, les trois cardinaux, invités de la conférence des Évêques du Vietnam sont arrivés dans le diocèse de Hanoi dont les cérémonies auront lieu à l’ancienne archevêché, l’actuel
Le cardinal Bernard Law
sanctuaire des saints martyrs du Vietnam. Les deux premiers cardinaux sont des anciens présidents des conseils pontificaux: le cardinal Bernard Francis Law, et son homologue le cardinal Roger Marie Elie Etchegaray. L’Archevêque de Hanoi, Monseigneur Joseph Ngô Quang Kiêt, les a présenté comme les deux ecclésiastiques de haute responsabilité dans l’Église, mais très proche de l’Église du Vietnam et des vietnamiens depuis les années difficiles. En même temps, le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris, président de la conférence des Évêques de France, est arrivé lui-aussi au Vietnam ce matin. Il a effectué cet après-midi, une visite dans le diocèse de Bắc Ninh, berceau de la musique folklorique vietnamien ‘Quan Ho’ “à la découverte de la culture du pays”.

En cette solennité du Christ, Roi de l’univers, l’archevêque de Hanoi a invité, ce matin, le cardinal Law, et ce soir, le cardinal Etchegaray à présider la messe à la cathédrale saint Joseph de Hanoi. Tous les deux ont prononcé l’homélie en cette fête en insistant sur le sens de la foi en Christ, Roi de l’univers et invitant les chrétiens à suivre fidèlement son chemin. Ci-dessous est l’homélie complètement transcrite du cardinal Etchegaray:

«Chào các bạn», c’est l’unique phrase en vietnamien que je puisse prononcer, mais c’est une salutation très religieuse à mes frères et sœurs ici présent. Aujourd’hui, l’Église fête le Christ, Roi du l’univers en cette dernière journée de l’année liturgique avant d’entrer dans une nouvelle qui nous rappelle toute la vie de notre Sauveur, Jésus. Ce titre, le Christ, Roi de l’univers, peut choquer aujourd’hui nos mentalités. Pourtant, les raisons pour lesquelles un pape moderne, un alpiniste Pie XI avait institué cette fête il n’y a pas si longtemps, sont les plus actuelles que jamais.

Le cardinal Roger Marie Etchegaray
Le vrai Seigneur de l’univers, et de chacun de nous, c’est le Christ, il faut le croire. Le tout est de ne pas s’étrangler sur le vrai sens de cette réalité capitale, et d’autant plus, difficile à saisir qu’elle ne ressemble en rien à quelques puissances terrestres. Le Christ n’est ni un prince, ni un empereur, ni un président chef de parti. Jésus l’a dit lui-même: « Mon royaume n’est pas de ce monde. Je suis né dans ce monde» (Jn 18,36). Il n’a accepté ce titre de roi qu’à l’heure de sa mort. Lorsque toute ambiguïté sera effacée. Certains de ses disciples voulaient faire de lui un roi sur terre. Lui, a refusé et le moment où nous chrétiens, pouvons le reconnaitre comme un Seigneur, c’est le Christ avec une couronne d’épines. Il faut bien comprendre ce que veut dire “Seigneur de l’univers ». Pour moi, j’ai été frappé, j’habite Rome, j’avais fait mes études à Rome, j’allais très souvent à une très grande basilique Saint Paul-hors-les-Murs. Pour quoi ? Parce que là-bas dans cette basilique, à l’endroit où saint Paul a été martyrisé, il y a une grande fresque qui représente le Christ, comme on dit, Roi de tous. Et on voit le Christ majestueux, et on voit à ses pieds, tout petit, le pape de l’époque, qui baise les pieds du Christ, Seigneur. Ainsi, l’Église apprend à tous ses fidèles, et même au pape, à être avant tout le serviteur de ses frères, un serviteur qui sert à table, qui lave les pieds de ses apôtres. Hélas ! Ne l’oublions pas. Il faut prendre la réalité comme elle est.

Nous vivons aujourd’hui un temps inconfortable où très peu, même parmi les chrétiens pensent que le Christ est le Seigneur de l’univers. L’endroit, le lieu sacré où on peut le mieux comprendre que le Christ est le Seigneur de l’univers, c’est ici, à la table de l’eucharistie. Le moment où, avant de mourir, Jésus non seulement a donné sa vie pour nous, son corps et son sang, toute sa vie, mais aussi, d’une manière concrète à laver les pieds des apôtres. Pour moi, le moment le plus
significatif de l’eucharistie, c’est juste après la consécration quand, d’une manière ou d’une autre on chante: “Viens, Seigneur Jésus ! Viens dans ta gloire.» La messe est l’endroit où nous attendons le retour d’un Christ crucifié, mais glorieux alors, le vrai Seigneur.

Je pense à la parole du bon larron, crucifié à côté de Jésus, et qui demande à Jésus: «Souviens-toi de moi, quand tu seras entré dans ton Royaume des cieux» (Lc 23,42). Quand nous chantons: “Viens, Seigneur Jésus », dans la tête, l’aspiration, l’appel le plus poignant de tous chrétiens au moment de la messe, nous attendons le retour d’un Christ glorieux qui va transformer toute notre vie. Et la réponse de Jésus: «En vérité, je te le dis, aujourd’hui même, tu seras avec moi dans le paradis» (Lc 23,43). Si nous voulons entendre cette parole, j’ose dire paradoxalement, nous devons nous reconnaitre des larrons, mais des larrons pénitents. Alors ce sera une grande fête pour nous tous, la grande fête de TET. Xin cám ơn.»


A la fin de la célébration, le cardinal Etchegaray a remercié les fidèles de Hanoi pour leur accueil chaleureux. Les trois bouquets de fleurs toutes fraiches, offertes au cardinal, à l’archevêque de Hanoi et au Père Etcharren, Supérieur des Missions Étrangères de Paris, se sont réunies en une seule qui, selon le cardinal, “représente l’unité de leur cœur».