CAMBODGE: Deux nouvelles vocations religieuses pour une Eglise qui renaît

L’Eglise catholique au Cambodge, qui se relève lentement de sa destruction lors de la période Khmer rouge (1975-79), s’est réjouie, en mai dernier, de l’entrée de deux jeunes filles issues de la communauté catholique du pays, dans la congrégation d’origine française des Sœurs de La Providence de Portieux (1). Il y avait plus de quarante ans que des vœux n’avaient pas été prononcés au sein de la communauté religieuse, toujours présente au Cambodge mais qui ne comptait plus que 12 membres, avant l’entrée dans l’ordre de Sr Ann Mary Khhay Dany et de Sr Mary Mandela Den Chantha.

Sr Agnes Nguyen Thia, supérieure de la congrégation au Cambodge, a rapporté à l’agence Ucanews (2), que durant la tourmente Khmer rouge, tous les membres de l’Eglise avaient été tués ou expulsés. La congrégation de la Providence comptait à l’époque plus de 165 religieuses. La communauté n’a pu reprendre sa mission qu’au début des années 1990, lorsque le Cambodge, émergeant de plusieurs décennies de guerre civile, a autorisé le retour progressif de l’Eglise.

Pour Sœur Joseph Marie, supérieure générale de la congrégation, dont le siège est en France, l’événement est le « signe de la renaissance des Sœurs de la Providence au Cambodge (…) ainsi que de l’essor de l’Eglise catholique ».

Plus de 1 000 catholiques venus de tout le pays ont assisté aux vœux des deux jeunes religieuses en l’église de l’Enfant-Jésus à Phnom Penh. Le P. Emile Destombes, vicaire apostolique de Phnom Penh, Mgr Enrique Figaredo, préfet apostolique de Battambang, ainsi que quinze autres prêtres assistaient également à la cérémonie.

Sr Dany, 31 ans, d’origine vietnamienne, raconte qu’elle a longtemps hésité à prendre l’habit, étant l’aînée d’une fratrie de huit enfants et travaillant comme couturière pour subvenir à leurs besoins. Mais malgré cela, sa famille l’a encouragée à suivre sa vocation.

Sr Chantha, elle aussi issue de la communauté vietnamienne, très présente au sein de l’Eglise au Cambodge, a pratiquement le même parcours. Sa famille étant tombée dans la misère et ayant perdu jusqu’à sa propre maison, la jeune fille, qui était la septième de dix enfants, a dû « repousser son rêve » pour travailler dans une usine de fabrication textile et permettre aux siens de vivre. Ce n’est qu’en 2005, lorsque sa sœur aînée s’est mariée, qu’elle a pu rejoindre la congrégation. « Tout est dans les mains de Dieu, dit-elle. Si je veux ressentir son amour, je ne dois jamais arrêter de le chercher ni de tenter de le rejoindre. »

Aujourd’hui, les sœurs de la Providence dirigent près de l’église de l’Enfant-Jésus un foyer pour les jeunes filles de familles pauvres, venues de la capitale et de ses environs. Leurs pensionnaires vont à l’école publique, la congrégation leur fournissant le logement, les repas, les vêtements et le matériel scolaire. Les religieuses leur dispensent également des cours d’éducation morale.

Un autre centre, géré par la congrégation, accueille des enfants handicapés issus de familles défavorisées. Venus de tout le Cambodge, ils sont pris en charge par les religieuses, tant au plan matériel, financier que psychologique et moral. Les enfants, dont certains sont des victimes de la guerre civile et ont perdu des membres en sautant sur des mines anti-personnel, souffrent de divers handicaps, de la surdité à la tétraplégie; la plupart d’entre eux suivent un enseignement dans des écoles adaptées aux handicapés.

Les sœurs de la Providence s’occupent également de jardins d’enfants, dispensent des soins médicaux dans un centre à Battambang et dans plusieurs villages; elles enseignent le catéchisme dans les trois juridictions ecclésiastiques du Cambodge.

(1) La congrégation des Sœurs de la Providence de Portieux, ordre apostolique destiné à l’éducation chrétienne, a été fondée en Lorraine à la fin du XVIIIe siècle par le Bienheureux P. Jean Martin Moyë. Très rapidement, la communauté essaime en Europe, en Amérique et en Asie. Au Cambodge, où elles sont envoyées dans les années 1880, les religieuses dirigent des orphelinats, des hôpitaux, des hospices, des centres de soins notamment pour les lépreux, et surtout de nombreuses écoles, jusqu’à la prise du pouvoir par les Khmers rouges.

(2) Ucanews, 16 juin 2009.